mercredi 28 mars 2012

FT Chapitre 3


Chapitre III
Voilà deux jours que Chazuro et Astrae avaient quitté Brâkmar. Après cette nuit étrange à la Tour de Gisgoul, les événements s'étaient précipités. Nos deux amis s'étaient rendus à la bibliothèque de la ville dans l'espoir de trouver des renseignements sur les Frozen Tears.
« Jeunes hommes, que puis-je faire pour vous aider ? » dit une voix sortie de nulle part sur un ton timoré. Tout d'un coup, ils virent un vieil hibou s'avancer vers eux. Vêtu d'un long manteau traînant par terre et de petites lunettes bien incrustées sur son bec, Jean-Sol Patre, le bibliothécaire de la ville semblait intrigué par l'intrusion de nos deux amis dans ce lieu on ne peut moins fréquenté. Aussi poussiéreux que ses livres...pensa Chazuro. Astrae expliqua au vieillard qu'ils cherchaient des renseignements sur les légendes du monde des douze et le Stabilisateur. Aussitôt le visage du hibou s'éclaira et il troqua son ton hautain pour un autre, beaucoup plus amical !
« Ah par ici mes amis ! Dans la section 8, allée 4 ! Venez, je vais vous montrer. » Les deux compagnons revinrent ainsi les bras chargés de livres de toutes tailles et de toutes formes. Ils s'installèrent aux gigantesques tables dominant le centre de la salle et se plongèrent dans l'histoire de leurs ancêtres...
Quelques heures plus tard, nos deux amis commençaient à se décourager. Les livres, même s'ils parlaient de l'action de Maimane, ne mentionnaient en aucun cas l'existence des « Givrés ».
« Aaaah mais il fallait le dire plus tôt, voyons ! s'exclama Jean-Sol. Je vous aurais alors dit tout de suite que ce n'est pas là que vous pourrez trouver de telles informations ! Cela vous aurait évité un temps fou en lecture inutile... bien que la lecture n'est jamais par essence inutile, elle forge l'esprit et... Pardon je m'égare ! » un sourire penaud illuminant son visage. « Pour trouver des réponses à de telles questions, la bibliothèque d'Amakna est le lieu idéal, mes amis !
- Raah j'aurais dû être plus clair ! Amakna ?
- Oui, ils ont la plus grande collection de livres sur les clans, des plus célèbres aux plus méconnus ainsi que de très vieilles éditions sur les légendes perdues que l'on a préféré conserver là-bas. Ne me demandez pas pourquoi, je ne le sais moi-même ! De plus, Harry Stote est un très bon ami à moi : dites-lui que vous venez de ma part, ça vous évitera de devoir gagner sa confiance pour qu'il accepte de vous montrer certains ouvrages rares. C'est vrai qu'il est très méfiant. Tous les hiboux le sont mais lui est vraiment....
 - Bon... le coupa Astrae. Eh bien nous te remercions pour ton aide précieuse, Jean-Sol. Allons-y Chaz', on a perdu assez de temps comme ça.
- Bon courage ! Et n'hésitez pas si vous avez besoin d'autres informations ! » répondit le hibou en esquissant un clin d'oeil.
Il n'était pas si désagréable que ça finalement, ce bibliothécaire ! Il était même plutôt sympa ! C'est sur cette pensée que les deux démons repartirent se fondre dans la foule .
Et l'ambiance y était tout autre....Le bruit courait dans la ville que le village de Zoth, de la lointaine île d'Otomaï, était tombé sous le pouvoir des anges. Et encore une fois, une Pandalette était citée...

Nos deux amis n'hésitèrent pas longtemps. Ils voulaient des réponses. D'où venait ce loup blanc qui ne se cachait plus ? Quel était son lien avec les Frozen Tears ? Pourquoi Sénécia combattait-elle avec les troupes de Bonta ? Pour quelles raisons la guerre entre les deux villes s'intensifiait-elle autant ces derniers mois ? Les réponses à ces questions étaient hors de Brâkmar et il fallait parcourir le Monde des Douze. Chazuro et Astrae se préparèrent et partirent donc en direction d'Amakna.

Le voyage était lent : en temps de guerre, les zaaps étaient coupés et toutes les dragodindes de Brâkmar avaient été réquisitionnées pour partir au combat. Nos deux amis étaient donc à pieds, sillonnant les landes de Sidimote pour atteindre les montagnes Koalak et son village. Une fois là-bas, il y aurait deux choix : le nord et la forêt sombre, repère d'arbres ancestraux plutôt agressifs, ou l'est et les marécages infestés de crocodailles tout aussi hostiles.
Mais tout cela était encore loin et si les landes étaient un terrain familier pour Chazuro et Astrae, la montagne, elle, leur était encore inconnue.

De l'autre côté du monde... hmm... eh bien la ponctualité n'est pas de mise avec celui-là... Les gens affluaient dans tous les sens. Ce qui n'était pas plus mal : ça évitait de se faire trop remarquer.
« Feuilles de salace et cawottes à volonté, mesdames et messieurs ! 50 kamas de réduction pour 10 kg achetés ! »
Un livreur pressé surgit de nulle part en coupant la route.
« Eh !! Vous ne pouvez pas faire attention, non ?! »
Non mais pour qui il se prend celui-là ?! Grr... il mériterait que je lui fasse goûter de ma hache !
« Bonjour Mercenaire.
Bonjour, sursauta Sénécia, qui n'avait pas senti l'ombre apparaître dans un coin derrière elle. Elle s'approcha de quelques pas, essayant encore une fois de percevoir un visage sous le capuchon de son mystérieux commanditaire.
Votre mission est actuellement un succès : le village brigandin, le territoire des Dopeuls et le village Zoth sont maintenant bontariens. Tout cela est parfait...
...merci monsieur...
...mais rien n'est encore fini. J'ai soufflé aux Bontariens et à cet idiot de Thomas Sacre que Tainéla était indispensable pour leur guerre contre Brâkmar.
Dans quel but ?
Il ne vous est pas utile de le savoir pour l'instant. Vous allez les aider, votre force a l'air de les galvaniser. Mais n'oubliez pas ! Vous êtes à mon service, pas au leur...
Absolument ! aquiesça la Pandalette.
Je préfère être sûr... Comme convenu, voilà votre prime, dit l'homme en jetant une bourse à Sénécia. Le reste viendra pour la fin de votre mission. Laissez-moi maintenant. »

Sénécia se retira et reprit la route en direction d'Astrub et Tainéla... Etrange... La plupart des gens pour qui elle travaillait recherchaient la discrétion, elle en avait l'habitude. Mais dans le cas présent... Il ne me met même pas au courant du but de l'opération ! Je ne suis pas un pantin quand-même ! Quel est son intérêt dans cette guerre ? Pourquoi manipuler Bonta contre Brâkmar ?... Des plans tordus, elle en avait connu, mais des comme celui-là, jamais !Oh et puis après tout, il me paye, je n'ai rien à dire... et puis ça m'occupe !
« Hiiiii ! 
-Aïe ! Lâche-moi, sale petite bête ! » La Pandalette, perdue dans ses pensées, n'avait pas remarqué qu'elle était arrivée dans le coin des Tofus. Et ces petites choses appréciaient rarement qu'on leur marche dessus ! Tout en continuant son chemin, Sénécia repensait au déroulement de ces derniers mois... Cette mission est plus longue que d'habitude... Des images du village brigandin et de Chazuro lui revinrent en mémoire... J'espère ne pas l'avoir trop amoché... ça serait dommage... non reprend-toi, on s'en fiche s'il est éclopé, c'est un ennemi après tout !... Mais il est vivant puisque des loups les ont sauvés... raah pourquoi je suis partie si vite en pensant la victoire acquise ?... Elle avait commis une erreur qui n'était pas dans ses habitudes... Mais des loups ! pfff avoir peur de loups !... et puis quoi encore ?! Ils valent vraiment rien ces soldats aux ailes blanches !... Il était craquant quand-même... oh allez, arrête Séné !... Elle ne devait pas se laisser distraire par ce genre de futilités, surtout pas maintenant... Garder son calme et rester concentrée sur l'objectif...
Elle planta un grand coup de hache sur le côté, clouant une arakne sur la souche d'un arbre.
« Je déteste ces bestioles ! Une fois mais pas deux ! » dit-elle tout haut en reprenant sa marche.... Et cette bataille des Dopeuls !... Elle avait bien fait d'attendre que le coeur du village soit ouvert pour prendre les démons à revers... Il paraît même qu'on a vu mes flasques explosives jusqu'à Brâkmar !... D'un air satisfait, Sénécia poursuivit ainsi sa route...

Chazuro et Astrae, pour leur part, étaient enfin dans la montagne Koalak. La végétation contrastait totalement avec celle des landes de Sidimote. Elle était luxuriante, d'un vert incroyable, pleine de fleurs. Le soleil baignait le tout dans une luminosité chatoyante et des plantes grimpantes tapissaient les parois rocheuses. Nos deux compères étaient éblouis par tant de beauté. La différence était flagrante avec Brâkmar et ses environs et la richesse des paysages du Monde des Douze les surprenait de plus en plus.

Tout d'un coup, des grands bruits de feuillage sur leur droite les firent sursauter. Un troupeau de dragodindes sauvages leur coupa la route, les renversant au passage. Celles-ci semblaient fuir à toute vitesse un féroce prédateur... Effectivement, quelques secondes plus tard, un Enutrof arriva par le même chemin. Il était tout rouge et totalement essoufflé.
« Pff Pff... courent trop vite ces oiseaux-là... pfff pfff... raah mon dos... pfff pfff... c'est plus de mon âge ce genre de sport....ah tiens, des touristes ! dit-il en remarquant enfin notre Sacrieur et notre Iop en train de se relever.
Bonjour vieil homme, répondit Astrae
Vieil homme ! Vieil homme ! Et puis quoi encore ! se rebiffa l'Enutrof. Je n'ai que 199 ans, jeune impertinent ! Et que faites-vous par ici ? Vous êtes pas du coin et ça se voit ! Par les temps qui courent, afficher son appartenance à Brâkmar est chose risquée...
Nous sommes fiers d'être démons !
Ouais ouais je vois ça, moi aussi ! Mais c'est pas pour ça que je me pavane de la sorte. Que venez-vous faire dans le coin, jeunes guerriers ?
Nous allons en Amakna....
A deux ? hmmm ça sent les déserteurs à plein nez, renifla le papy...Encore deux jeunes qui mériteraient un coup de pied dans le derrière de la part de Dimple ! maugréa-t-il dans sa barbe.
Non non, nous ne sommes pas déserteurs, nous sommes à la recherche.... Chazuro fût interrompu par un grand coup de coude d'Astrae.
A la recherche ? Vous cachez quoi ? Bon c'est pas grave... allez venez je vais vous passer des tenues moins voyantes. Un jus de palme, ça vous tente ? Au fait, je me nomme Taiky !

L'Enutrof tourna les talons et repartit à travers les arbres. Chazuro et Astrae lui emboîtèrent le pas tout en discutant à voix basse de ce qu'il fallait dire ou ne pas dire sur leur enquête. Ils décidèrent de parler à ce curieux vieillard des Frozen Tears et de la guerre. Taiky les mena jusqu'à une petite clairière, où se trouvait une maison en bois de kalyptus et un petit enclos.
« Suivez-moi ! »
Taiky s'engouffra dans la maison. Une grande pièce servait à tout : il y avait un grand lit, une table, des chaises, une penderie et un coffre-fort. En somme, le strict minimum, pas de superflu. Le vieil homme vivait à la dure et surtout comptait ses kamas tous les soirs. Cette demeure n'était pas très bien entretenue, la poussière s'amassait sur des monticules d'objets tellement étranges que Chazuro et Astrae n'en reconnaissaient pas le quart. Par contre, elle témoignait du passé du vieil Enu : au mur, une collection de pelles et de marteaux étaient accrochée et les meubles dépareillés provenaient des quatre coins du monde.
«  Faites pas attention au désordre, je vis dehors au soleil, se justifia Taiky. Choisissez-vous une tenue discrète et pratique, moi je vais voir mes bêtes, dit-il en ouvrant l'armoire.
Merci de votre aide.... »
Mais Taiky était déjà retourné dehors. Chazuro et Astrae fouillèrent l'armoire. Celle-ci regorgeait de trésors du monde entier : des tenues koalaks bien sûr, en fourrure d'un magnifique bleu azur, mais aussi des objets étranges à base de noix de Kokoko et de grandes feuilles séchées, des casques plus travaillés en bois peint, ainsi que des armures brâkmariennes datant des anciennes guerres. Au fond de l'armoire, une boîte renfermait une impressionnante collection de badges de miliciens bontariens.
« Regarde cette boîte ! Il a dû en faire des raids sur Bonta pour avoir autant de badges ! s'exclama Astrae.
- Oui et puis avec autant de tenues, il a dû voir autre chose que Brâkmar et les Landes de Sidimote...
- C'est sûr, c'est un grand baroudeur apparemment... »
A côté, plusieurs chausses s'entassaient. Une magnifique paire de sandales circulaires semblait être la seule utilisée régulièrement par Taiky. Finalement, ils finirent par troquer leurs capes brâkmariennes contre des capes bleutées toutes simples.
Une fois changés, ils sortirent de la maisonnette et trouvèrent leur hôte gesticulant devant son enclos. Debout, assis, râlant, lançant des bisous, vociférant, tapant dans les mains, il s'en donnait à cœur joie pour élever ses dragodindes ! Ces grandes montures de couleurs variées, résultant d'un étrange croisement, avaient constamment l'air hagard avec leurs yeux globuleux, ressortant excessivement de leur orbites, leurs grandes pattes d'autruche qui leur permettaient de faire de gigantesques bonds et leur grande queue de dragon, courbée comme si ce curieux appendice était trop grand et trop lourd pour elles à porter. Mais il ne fallait pas se fier aux apparences car au-delà de ça, c'étaient surtout d'excellents compagnons de route, d'une résistance incroyable et qui permettaient d'aller deux fois plus vite qu'à pieds ! A voir la façon dont le petit vieux s'agitait, on se doutait que ce n'était pas des animaux faciles à dompter. Mais une fois que c'était fait, il n'y avait pas plus doux et fidèle.
Taiky, entre deux mouvements, leur fit signe de s'asseoir. Il avait préparé le jus de palme promis, à l'ombre d'une sorte de grand palmier en pot.
« J'ai ramené ce Kokoko de l'île de Moon, juste pour me sentir en vacances. Agréable, n'est-il pas ?
Oui, très ! répondirent en cœur Astrae et Chazuro, profitant pleinement de l'ombre salvatrice de l'arbre.
Vous avez déjà été là-bas ? »
Ils commencèrent ainsi à discuter ensemble de tout et de rien. L'Enu donnait l'impression d'avoir vu tellement de choses du haut de ses presque deux siècles que cela suscitait le respect chez nos deux jeunes aventuriers. Comme pour ses dragodindes, il ne fallait pas se fier à l'allure : il avait sans nul doute été un très bon guerrier avant de se reconvertir dans l'élevage.
« Bon, d'ici 154 heures 32 minutes et 27 secondes, mes dindes devraient mettre bas. Je suis content, je vais pouvoir les vendre au marché !
Vous en avez beaucoup ? demanda Chazuro.
Un couple de chaque race, répondit fièrement Taiky. Enfin, sauf des Amandes qui m'ont encore échappé ce matin. Et encore, je ne fais pas de l'élevage intensif ! Mon enclos est trop petit : 4 places seulement ! J'ai confié les autres à mon ami Darkin qui habite dans le coin : il a une étable. Il me tarde que la guerre cesse et qu'Emma puisse enfin finir les gigantesques enclos au sud de Brâkmar. D'ici là, j'aurais assez d'économies pour me payer un enclos 12 places. Et une fois acheté, je serai le roi de la dinde !
A propos de la guerre, reprit Chazuro, vous en pensez quoi ?
Hmmm difficile à dire... Bonta étend sa domination, mais le choix des territoires est surprenant.
Comment ça ?
C'est trop bien pensé pour ressembler à une idée de Thomas Sacre...
Trop bien pensé ?
Oui, généralement les affrontements ont lieu à Pandala pour la domination des villages. Alors que là, ils ont pris le village brigandin pour le transport, soit, mais pour les Dopeuls et les Zoths, il n'y a aucune raison apparente de faire autant de dégâts. Ce ne sont pas des zones si stratégiques que ça. Il doit donc y avoir un but caché. Mais si c'est caché, c'est pas Sacre. Il est trop prévisible et idiot pour avoir un objectif secondaire....A moins que ça soit sa bêtise, plaisanta l'Enu.
Je comprends, dit Astrae.
Je dois être un bon professeur pour que tu comprennes, jeune Iop, ironisa Taiky.
Nous voudrions vous poser une autre question, continua Astrae, laissant passer la pique à son encontre. Il l'aurait bien assommé mais il voulait aller plus avant dans le sujet qui les intéressait vraiment. Avez-vous déjà entendu parler des Frozen Tears ?
Les Frozen Tears ? répéta le vieil homme avec un regard mêlant à la fois stupeur et curiosité.
Oui.
Hmmm en voilà une drôle d'idée...ainsi des gens connaissent encore cette ancienne légende... »
Astrae et Chazuro se redressèrent sur leurs fauteuils. Le silence se fit dans la forêt, comme si toute la nature environnante s'était figée d'un seul coup au son du nom des « Givrés ». Taiky, cet Enutrof rencontré inopinément, était la première personne qui semblait avoir déjà entendu le nom de Frozen Tears.
« Frozen Tears... murmura-t-il. Que voulez-vous savoir ?
Tout, répondit prestement Chazuro, impatient d'apprendre enfin quelque chose de nouveau.
C'est un long récit, répondit Taiky, le regard malicieux, jouant de l'impatience qu'il avait provoqué. Mon grand-père me racontait une histoire quand je n'étais qu'un jeune Enutrof jouant avec son premier kama. Cette légende racontait la vie d'un clan sur un territoire gelé. Ils s'appelaient les Frozen Tears et prônaient une forme d'éducation, l'élite de l'élite, celle qui ne parle pas le Bwork... »

Plus aucun gazouillis d'oiseaux dans les arbres, plus de bruits de dindes se baladant alentours. Le temps semblait suspendu. L'humidité de l'air était presque palpable et l'on pouvait maintenant apercevoir des centaines de petits yeux luisant à l'ombre des Kalyptus qui les observaient et écoutaient curieusement.

«  C'était un clan valeureux qui, malheureusement, s'est éteint il y a des siècles car plus personne ne correspondait à leurs critères. Mon papy disait aussi que les Frozen Tears équilibraient le monde en apaisant les colères et contenant les amours. Mais tout cela n'est qu'une légende, rien ne me semble très possible là-dedans.
Un territoire gelé ?
Oui ! Le légendaire continent des glaces : Frigost ! Mais vous, que savez-vous sur les Frozen Tears ? »

Chazuro prit la parole et expliqua le texte de la cellule, omettant volontairement l'épisode du loup. Il préférait garder cette partie de l'histoire secrète, craignant des réactions bizarres ou d'être accusé de folie.

« Hmmm intéressant, ça colle presque à l'histoire de mon grand-père.... Mais que faites-vous ici pour cette recherche ?
Nous nous rendons à la Bibliothèque d'Amakna pour chercher de plus amples renseignements. Nous espérons trouver un livre relatant cette ancienne histoire. À moins que cela ne soit qu'une légende...
Oh ! Vous êtes jeunes, c'est bien de partir à l'aventure même si ça ne mène à rien au final ! »

Comme si elle l'avait écouté, la forêt recommença à vaquer à ses occupations.

« Tiens ! Vous me plaisez bien, je vais vous donner des dragodindes pour votre voyage. Ça vous permettra d'aller plus vite et le cas échéant de fuir le danger.
Merci à vous !
Mais de rien ! Par contre, j'aurais besoin d'un service : si vous passez en Amakna, arrêtez-vous à la Taverne. Il doit y avoir un Crâ qui traîne par là-bas, il s'appelle Hapero, c'est un ami à moi. Si vous pouviez lui dire de venir ici... Sans son aide, je ne vais jamais attraper ces satanées dindes amande.
Bien sûr ! Sans problème !

Taiky se leva et sortit deux montures de son enclos : une noire qu'il amena à Chazuro.
«Voilà TartoMyrtille, elle est courageuse et agile, une belle bête avec une superbe généalogie. Et pour toi jeune Iop, voilà Chantilly, attention elle est forte et puissante mais un peu craintive, » expliqua-t-il en approchant une dinde ivoire.
Il leur fournit quelques conseils pour s'en occuper correctement puis leur donna une tape d'adieu. Astrae et Chazuro repartirent de la clairière en faisant de grands signes à Taiky. Cette rencontre avait été pour eux riche en enseignements. Chazuro mit sa dragodinde au galop, suivi de près par Astrae. Il leur fallait maintenant traverser les marécages les séparant du village d'Amakna...
Taiky, lui, retourna tranquillement vers son enclos... ahlala ces jeunes...les Frozen Tears...toujours rêvé de poursuivre cette légende...d'aller sur Frigost...enfin surtout de découvrir son emplacement... je suis trop vieux maintenant...Le vieil Enutrof recommença à gesticuler devant son enclos, tout en réfléchissant. Un sourire illumina son visage...Quoique...

Chazuro écrasa un moustique sur son bras....Satanées bestioles...Le paysage avait totalement changé. Les merveilles de la montagne étaient derrière eux : devant et à perte de vue s'étendait un pays marécageux et hostile. L'air y était plus lourd, le sol boueux...Heureusement que le vieux Taiky nous a donné des dragodindesSans elles, la traversée prendrait des semaines... Le Sacrieur entendait, derrière lui, Astrae râler et pester. L'eau n'était pas son élément, loin de là, alors la boue et toutes les créatures cachées en dessous encore moins ! Plus ils s'enfonçaient dans les marécages, plus leurs montures avaient du mal à avancer.
« Va falloir continuer à pieds, on les épuise trop vite dans cette boue.
Oh non, pas à pieds... gémit Astrae
Allez, ce n'est que de l'eau et on ira plus vite ! Fais attention....
Ahhhhhhh......

Chazuro n'eut pas le temps de finir sa phrase : son ami, en sautant de sa dinde, était tombé dans des sables mouvants.
« Surtout ne bouge pas ! Je vais te tirer de là, dit-il, lui lançant un bout de corde.
Facile à dire, c'est plein de bestioles ici ! Mais dépêche-toi ! Tire ! Tire ! »

Au moment où il allait commencer à sortir Astrae de la boue, le Sacri sentit une vive brûlure dans son dos. Immédiatement, il se retourna mais ne vit rien.

« Là ! Dans ton dos ! Une arakne ! cria le Iop.
Raah horrible animal...
Sors-moi de là, vite ! »

Chazuro se concentra à sauver son ami, l'arakne continuant à le mordre. Astrae, une fois tiré d'affaire, l'en débarrassa.
« Tu as le dos couvert de piqûres... tu es sûr que tout va bien ? demanda-t-il inquiet.
Oui ça ira, surtout que nous avons d'autres visiteurs, répondit Chazuro désignant les trois crocodailles s'approchant férocement. »

Un difficile combat dans la boue commença. Les crocodailles disparaissaient dans l'eau boueuse et revenaient à la charge à revers. Astrae et Chazuro contenaient les attaques mais avaient du mal à toucher leurs fuyants adversaires. Les crocos étaient insaisissables dans ce marécage, le terrain et leurs capacités amphibiennes les avantageaient grandement. Chazuro sentait toujours les piqûres de son dos... mes jambes s'engourdissent... la boue ne m'aide pas .. fichue arakne... il serrait dent, il avait de plus en plus de mal à se mouvoir. Les créatures des marais arrivaient de plus en plus nombreuses, attirées par l'odeur du sang qui suintait dans le dos du Sacrieur.
«  Astrae ! Aide-moi, je suis paralysé ! Je ne peux plus bouger ! » cria soudain Chazuro.

Le Iop se retourna après avoir envoyé un bon coup d'épée dans la gueule d'un croco pour le faire reculer. Son ami s'était évanoui, incapable de bouger. Il s'enfonçait dans le marécage. Astrae bondit à ses côtés, le souleva tout en écrasant du pied des boos et des araknes. Vite ! Retrouver une dinde...ah ! Elles ont trouvés de la terre ferme, je préfère ça !... Il se dirigea vers les dindes. Chantilly s'enfuit en le voyant approcher poursuivi par une horde de crocodailles.Taiky avait raison...pas intrépide le dindon.... Il hissa son ami sur le dos de TartoMyrtille... Je suis sur la terre ferme, petits crocos... c'est mon terrain... vous allez souffrir.... Astrae planta violemment son épée dans le sol, créant un véritable tremblement de terre. Les crocodailles tombèrent à la renverse et déguerpirent dans le marais... courageux mais pas téméraires...Chaz' a pas l'air bien... il faut sortir des marais et trouver des soins.... Vite, le temps presse.... Astrae enfourcha la dragodinde tout en tentant de maintenir son ami dessus puis l'éperonna pour partir au triple galop sur cette bande de terre qui semblait mener droit vers Amakna

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